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climat | Canal Seine-Nord Europe : Communiqué des Soulèvements de la Terre

Publié dans Carnages urbains (hiver 2025) | Par Les Soulèvements de la Terre
Mis en ligne le 22 août 2025
Oiseau tenant dans son bec une pince coupante.

Dans le Nord, on entend une rumeur depuis longtemps. Elle se murmure de Compiègne à Aubencheul-au-Bac, à Soissons ou à Lille et même au delà des frontières belges. C'est celle d'un canal gigantesque : les plus grandes écluses d'Europe, une giga-bassine 20 fois plus volumineuse que Ste-Soline. C'est le « chantier du siècle ». Depuis quelques temps, ces échos prennent forme à coup de tronçonneuses et tractopelles. Mais certain·es se préparent à couper court à cette cacophonie, à reprendre les terres et réduire le projet au silence. Communiqué des Soulèvements de la Terre.

De Paris à Bruxelles, la lutte contre le Canal Seine-Nord Europe s'organise ! Ce week-end, nous, habitantes et habitants d'Arras, Beauvais, Bruxelles, Compiègne, Creil, Laon, Lille, Paris, Péronne et Noyon, nous sommes organisé.es pour pointer du doigt les responsables de chantier du Canal-Seine-Nord-Europe pour apporter un contre-discours et un contre-argumentaire à ce projet mortifère.

Alors qu'un recours juridique contre ce projet est prévu pour le 9 décembre et que les travaux de destruction du territoire ont débuté, cette action marque le lancement d'une campagne de mobilisations qui ne prendra fin que lorsque ce projet sera enterré.

Grâce à nos impôts, l'argent coule à flots

La France n'a plus de sous. Il faut faire des économies. Il faut faire travailler les Françaises et les Français plus longtemps. Il faut arrêter de gaspiller l'argent public. Les politiques et les grands médias nous le répètent sans cesse : la France est en crise, le pays doit se serrer la ceinture.

Et voilà pourtant que des milliards d'euros d'argent public viennent d'apparaître. 8 milliards pour financer le plus gros chantier jamais réalisé en France, un méga-canal de 107 km de long entre Compiègne et Cambrai.

8 milliards qui ne financeront ni l'hôpital public ni l’éducation de nos enfants, mais bien une autoroute à péniches reliant le bassin parisien aux ports d’Anvers et de Rotterdam, autoroute pensée pour décupler les profits de l’agrobusiness et des géants de la logistique.

8 milliards qui ne serviront pas à lutter contre la précarité et le taux de chômage élevés du Nord de la France, mais bel et bien à ouvrir la batellerie artisanale à la concurrence déloyale de la flotte industrielle néerlandaise et belge.

8 milliards qui ne viseront pas à atténuer les dévastatrices inondations dont la fréquence augmente au fil des années, mais à artificialiser encore plus nos sols, et ainsi aggraver ces phénomènes extrêmes.

Ce projet aurait des conséquences mortifères : 3000 hectares de terres agricoles et naturelles consommées, un village coupé en deux, des digues allant jusqu'à 45 mètres de haut, 78 millions de mètres cube de terre excavés (l'équivalent de 10 tunnels sous la Manche), 35 millions de mètres cube d'eau stockés dans le canal et sa retenue d’eau (grande comme 22 bassines de Sainte-Soline) et 300 espèces protégées menacées dont 169 qui ont été autorisées à être tout simplement éradiquées.

Des responsables irresponsables

Nous dénonçons Xavier Bertrand qui a tout fait pour remettre à l’ordre du jour ce projet de méga-canal. Bouygues et Vinci n'ont pas souhaité se charger du chantier car non-viable économiquement. Mais Xavier Bertrand, président de la région des Hauts-de-France, a créé la société du Canal-Seine-Nord-Europe où il siège en tant que président ce qui permet de rendre le chantier du canal viable grâce à l'injection de milliards d'euros.

Nous dénonçons avec fermeté la présidence de la région Hauts-de-France, l'état français et l'Union européenne, qui détournent l’argent public pour servir des profits privés, tout en piétinant la démocratie. Déclaré d'utilité publique il y a 16 ans, les promoteurs du méga-canal n’ont jamais considéré les nombreuses critiques émanant d’acteurs aussi variés que la Cour des comptes européenne, l’Autorité Environnementale, l'Inspection générale des finances et bien évidemment la population locale qui s’est toujours opposée à un tel projet.

Contre les mensonges des responsables politiques qui fantasment une « réindustrialisation logistique », nous dénonçons ce projet de méga-canal qui n’accentuera que les tendances néfastes de la mondialisation. Ce projet n'apportera rien aux travailleuses et travailleurs locaux qui n’ont jamais bénéficié des politiques de libre-échange, et les quelques emplois créés seront dans l'industrie de la logistique, un secteur connu pour sa pénibilité et sa précarité.

Enfin, nous dénonçons les entreprises qui participent actuellement au ravage de notre territoire : le Groupe ETPO, Berthold, Buesa, Charier, Demathieu Bard, Lhotellier, Roger Martin, SPIE Batignolles et NGE (déjà chargée du sinistre projet de l’A69). Ces acteurs acceptent de participer à un projet absurde et d’être liés à LAFARGE, géante du BTP présente sur le chantier alors qu'elle est mise en examen pour financement de l'organisation terroriste Daesh.

Pour toutes ces raisons, nous exigeons l'arrêt immédiat du chantier du Canal-Seine-Nord-Europe, et une réelle considération des alternatives existantes.

Elles sont, en effet, nombreuses, à commencer par le recours aux infrastructures existantes. Ainsi, le Canal du Nord, achevé en 1965, se situe à quelques mètres du projet de méga-canal, et est loin d’être saturé : 2 fois plus de marchandises y circulaient dans les années 1980 ! Rénovons l’ensemble du réseau de canaux à petit gabarit, aujourd’hui totalement délaissé. Modernisons nos infrastructures de fret ferroviaire : les Hauts-de-France possèdent le deuxième réseau du pays, mais celui-ci est sous-exploité en raison de sa vétusté et du manque d’entretien. Réencastrons nos politiques de transport dans des circuits économiques capables de répondre aux besoins de sa population sans maltraiter l’ensemble du vivant, en aidant notamment les agriculteurs et agricultrices à développer une agriculture vivrière et paysanne.

Une lutte soutenue par de nombreux mouvements

Face à cette gestion catastrophique de l'argent public, les habitantes et habitants du Nord de la France ne sont pas seul.es. Mégacanal non-merci, les Soulèvements de la Terre, Exctinction Rebellion, les Naturalistes des Terres, Bassines non-merci, Attac, Nord-Nature Environnement et les Amis de la Terre Nord se tiennent à leurs côtés, déterminés et prêts à intervenir.

De Paris à Bruxelles, en passant par Arras, Beauvais, Compiègne, Creil, Laon, Lille, Péronne, Noyon et St Quentin, nous sommes préparé.es à intervenir et à lutter aussi longtemps que vos machines s'acharneront à détruire notre territoire.

STOP MEGA-CANAL !

Issu du numéro 71 | «Carnages urbains»

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